Les artistes du Musée du sourire

Anthony Asael

Il a photographié près de 400 000 enfants dans 1650 écoles dans le monde, dans le cadre du programme Art in All of Us soutenu par l’UNICEF. L’un de ses clichés a été récompensé lors du Festival du sourire organisé par le musée du sourire en 2009, et présidé par Sabine Weiss, la photographe humaniste.…

Baldizzone

Il faut de l’altruisme et beaucoup de générosité d’âme pour parvenir à saisir l’instant où le sujet bascule, où la sensibilité s’exprime. C’est la raison pour laquelle les photographes italiens Tiziana et Gianni Baldizzone nous touchent tant. Des images belles, nourries par l’universel. A l’ère des selfies et du nomadisme, au-delà des individualités, Tiziana et Gianni Baldizzone visent l’authenticité. Pas d’effets picturaux ni de collages sophistiqués. « Seulement la lumière naturelle. Nous nous sommes mis au rythme des artisans. On n’a pas cherché le geste mais uniquement à entrer dans le vif de la relation humaine ». Un regard direct posé sur l’humain avec sagesse et humilité. De la poésie à l’état brut, comme dans ce masque du théâtre Nô entre les mains de l’artisan japonais où le sourire se grave dans l’air blanc.

Banksy

Vendredi 21 août 2015, dans la petite ville balnéaire endormie du Somerset, au sud-ouest de l’Angleterre, à une trentaine de kilomètres de Bristol, s’ouvre Dismaland (association du mot « dégoût » en anglais et de Disneyland), ce que le street artist anglais Banksy appelle son « Bemusement Park » (jeu de mot entre parc d’attractions et perplexité). Le Musée du sourire a acquis le catalogue de l’exposition historique faisant figurer sur la couverture, un smiley ironique et particulièrement rayonnant. Le compte Instagram de Banksy

Gilles Barbier

Sous le regard chaleureux de la femme âgée dessinée par Gilles Barbier, un univers s’ouvre. Ses rides profondes tracent des chemins de vie que l’on devine pleins de récits. Ce sourire, loin d’être seulement une expression figée, semble être une invitation. Une vigie du temps, un phare dans l’océan de l’existence. En contemplant son visage, on est frappé par l’émotion que dégage l’œuvre intitulée « Habiter le visage » (2017). Ce fusain semble capturer non pas un instantané de vie, mais une multitude d’histoires suspendues dans le temps. Lorsqu’on s’approche pour la première fois de cette pièce, on est frappé par la richesse des détails. Les baraques suspendues qui jalonnent les rides du visage forment un paysage miniature, une architecture improbable où chaque construction semble s’ancrer dans des souvenirs. Ces petites maisons blanches, posées comme des observatoires, ne sont pas là par hasard. Elles deviennent les témoins des émotions, des espoirs et des luttes d’une vie humaine. Gilles Barbier transforme ce visage en un territoire habitable. Les rides, que l’on associe souvent au passage inexorable du temps, se transforment ici en routes, en crevasses explorables. Le regardeur, presque involontairement, se projette dans cet espace, devenant un voyageur arpentant ces sillons. Il y a dans cette œuvre une proposition : celle de voir la vieillesse non pas comme une perte, mais comme un lieu, un refuge chargé d’histoires. Face à ce sourire, quelque chose de profondément humain se révèle. C’est une œuvre qui touche, car elle dépasse les frontières de l’esthétique pour pénétrer dans le domaine de l’intime. On ressent un mélange de tendresse et de respect. Ce visage pourrait être celui d’une grand-mère, d’une amie disparue, ou même une projection de soi dans l’avenir. C’est une méditation sur la fragilité, mais aussi sur la force et la résilience de l’humain. Le paradoxe de Gilles Barbier est qu’il parvient à figer un instant tout en donnant un souffle de vie à son œuvre. Les variations du fusain, les ombres discrètes qui sculptent le visage, tout cela donne à cette femme une présence presque tangible. L’œuvre ne se contente pas d’émouvoir. Elle interroge. Que signifie « habiter un visage » ? Est-ce une réflexion sur l’identité, sur le fait que nos traits portent les marques de ce que nous avons traversé ? Ou est-ce une métaphore plus large sur notre capacité à faire de tout espace – même un visage ridé – un lieu vivant, peuplé de sens ? Avec sa capacité à mêler le réel et l’imaginaire, l’artiste nous pousse à combler les vides. Il transforme le familier en inconnu, et l’inconnu en un terrain d’exploration. En regardant cette femme âgée, on ne peut s’empêcher de se demander : quelles histoires raconte-t-elle ? Et quelles histoires sommes-nous, nous-mêmes, en train de raconter à notre insu ? « Habiter le visage » est plus qu’une œuvre d’art. C’est une fenêtre sur la façon dont nous percevons le temps et les traces qu’il laisse en nous. L’échange a lieu. Puis c’est comme si cette femme nous avait confié un secret : celui de vivre pleinement chaque moment, et de porter nos rides, nos sourires et nos souvenirs comme des œuvres d’art en soi. Gilles Barbier est un artiste qui parle à l’humanité dans son ensemble, mais aussi à chaque individu en particulier. Il interroge les failles de nos identités, les zones d’ombre de nos souvenirs, et les multiples manières dont nous habitons le monde. À travers ses œuvres, il nous invite à embrasser l’incertitude, à accepter les lacunes comme des opportunités d’imaginer et à voir le réel comme un espace en constante transformation. Dans un monde saturé de données et de stimuli, Gilles Barbier nous rappelle qu’il est encore possible – et nécessaire – de rêver, d’inventer et de nous perdre dans les marges. Ses œuvres sont des invitations à voyager dans les territoires infinis de l’esprit humain. Pour en savoir plus sur Gilles Barbier

Ben

« Don’t smile », « Fermer les yeux », « Tous egos »… des titres évocateurs qui reprennent ce que Ben a écrit sur ses tableaux de cette écriture blanche sur fond noir qui a fait sa célébrité, comme écrit à la craie sur un tableau d’écolier. Ben appelle ces petites toiles des « tableaux-écritures ». Cet appel provocateur à ne pas sourire a été acquis auprès de la galerie Lara Vincy en 2019. La plaque a été dédicacé au Musée du sourire par l’artiste qui a ajouté le dessin d’un large sourire. Ben explique : « C’est le sens qui compte et non pas le graphisme, la toile est là pour dire une vérité : les vérités objectives (« ce tableau pèse 2 kg ») ou les vérités subjectives. »> www. le site de Ben www.ben-vautier.com

Florent Boisard

Art is the antidote » #251 de Florent Boisard est le premier NFT acquis par le Musée du sourire en novembre 2021: on y voit une bouteille dans laquelle est inclu un tableau, il s’agit d’une oeuvre à message… En 2020, pendant le confinement, le peintre a imaginé une série d’images reprenant un message positif au nom de l’art et des artistes. « Douceur là où le monde se fracture », explique l’écrivaine Marie-Line Baizamont. Connu pour ses aérographes colorés, ses lignes courbes et son approche gestuelle du dessin, Florent Boisard (né en 1973) choisit la plateforme OpenSea pour y jeter un millier de bouteilles pleines d’optimisme. Dans le flot des productions NFT, le Musée du sourire aura attrapé la bouteille aux couleurs de l’éther. instagram.com/florentboisard

Blitz

C’est dans le métro parisien en 1982 que l’artiste Blitz, de son vrai nom Jean-Baptiste Pontecorvo, s’est fait connaître défavorablement des services de police. Le trublion des agents de la RATP a fait partie des premiers graffeurs français. Il fréquente Keith Haring, partage ses bombes avec JonOne, croise le chemin d’André Saraiva. « Tous les week-ends, on entrait dans les catacombes via une plaque d’égout rue des Feuillantines, près du Panthéon, se souvient l’artiste. Il fallait descendre par une échelle, arpenter des petits couloirs, se casser parfois en deux pour passer. » Véritable pionnier du street art en France, en 1992, il participe à l’exposition collective « Rencontre franco-américaine du graffiti » au Musée des Monuments français. A l’invitation du Musée du sourire, il réalise le 3 juin 2023, le graff de la boutique du musée. « J’ai choisi une typo Bubble… Avec la Force Alphabétick, le collectif fondé dans les années 80, on avait l’habitude de signer avec un CK », dit-il. Autre création, et non des moindres, le Plan d’évacuation du Musée du sourire. Avec humour, il indique l’emplacement des oeuvres, celui de l’extincteur et les sorties de secours. Sa « Boutick » se trouve à l’entrée, dans le Corner shop.

Maurizio Cattelan

Vase, écharpe, coussin… Maurizio Cattelan et le photographe Pierpaolo Ferrari signent pour Seletti une collection capsule à la fois provocatrice, drôle, absurde, déviante… Les pièces sont ornées d’images tirées du magazine Toilet Paper, fondé en 2010 par les deux artistes italiens. Doigts coupés parfaitement manucurés, savon croqué, poisson farci de pierres précieuses, canari à l’aile coupée, bouche souriante dévoilant des chicots et mentionnant le mot SHIT ! Les motifs oniriques et teintés d’humour noir de Toilet Paper empruntent à la mode, à la publicité, combinant photographie commerciale, récits visuels tordus et imagerie surréaliste. Le vase SHIT est un cadeau reçu en mares 2022… merci Patricia !

Roman Cieslewicz

Une personnalité engagée, Roman Cieslewicz envisageait son rôle de graphiste en prise directe avec l’actualité. C’est ainsi une affiche de Mai 68 réalisée pour illustrer la couverture de la revue Opus qui a intégré la collection du Musée du sourire en mars 2018. Pas n’importe laquelle : « La Joconde », une larme de sang sur la joue en écho au mouvement contestataire en France… Artiste majeur de la scène graphique de la seconde moitié du XXe siècle, Roman Cieslewicz (1930–1996) est un acteur majeur de l’École de l’Affiche polonaise avant de conquérir le monde du graphisme au cours des premières années qui suivirent son arrivée en France.

Louise Cops

Paris, Munich, New-York… C’est un regard insolite et tendre qui traverse les scènes de vie croquées par la photographe belge Louise Cops. Sous l’objectif globetrotter de cette architecte de formation, qui a grandi au Congo, et vit désormais à Paris, l’esprit décapant et libre s’exprime, nourri de lignes et d’harmonie. L’œil saisit un point de fuite, s’enroule dans des rondeurs surgies d’un banc, embrasse l’espace d’une gare vide de ses trains et de ses voyageurs. « Le flâneur cherche des espaces libres », affirme le philosophe Walter Benjamin dans Le Livre des passages. Un vendeur attend le touriste occasionnel aussi immobile que ses tours de métal, des télescopages urbains sont pris à la volée comme ce pochoir montrant un chien face à un smiley rayonnant… La lumière parle dans chacune de ses photographies. Les matériaux, aussi. L’émotion peut ainsi jaillir de la brillance d’un asphalte mouillé, tel un secret imprégné de bitume. Le passage rapide d’une voiture ou les reflets rougeoyants d’un néon contrastant avec l’ossature austère d’un bâtiment, et c’est toute la scène qui s’anime dans un éloquent silence. En toute beauté, il est une blessure secrète. La photographie du chien vagabond a intégré la collection du Musée du sourire en novembre 2023. Tirage unique, signé.

Claude Closky

La matière première de Claude Closky, ce sont les mots, les signes, les nombres qu’il ordonne et réorganise jusqu’à semer le trouble. Des jeux de pistes altérant les automatismes de nos systèmes de représentation, et un goût de l’accumulation et des classements rationalisés comme à travers ses « 1000 premiers nombres classés par ordre alphabétique ». Le sourire de l’absurde, le sourire d’un « Hihihi » graphique sur une feuille quadrillée a intégréle musée. Claude Closky a joué sur le décalage des petits carreaux. Son rire dessiné est une exception dans le musée, comme tout ce qu’il fait.