Le sourire peut-il exister sans une intention humaine ?
Bienvenue dans l’ère des sourires 2.0. Visages numériques, IA générative, avatars interactifs : tout ce petit monde est capable de nous sourire. Parfaitement, mécaniquement. Mais peut-on encore parler d’expression quand il n’y a ni intention, ni émotion, ni vécu ? Les artistes se jettent à bras ouverts dans cette zone grise. Ils créent des œuvres où des visages numériques sourient en réaction à nos mouvements. Qui sourit, au fond ? Le programme ? Le spectateur ? L’artiste ? Le sourire devient un écho, une illusion construite à trois. Même les robots sociaux s’y mettent, conçus pour séduire, rassurer, créer un lien. Mais là encore, sans conscience, leur sourire est un masque vide. Le philosophe John Searle le rappelle : sans intention, un comportement — même bien imité — reste une coquille vide. Et si, finalement, l’intention ne résidait pas dans le sourire, mais dans notre regard ? Ce que l’art nous chuchote depuis des siècles, c’est que le spectateur a toujours eu le dernier mot. L’émotion n’est pas dans le marbre, elle est dans celui qui regarde. Illustration : Agnieszka Kurant (Jeu de Paume, 2025)